Point BD #2 : de la bande-dessinée jeunesse engagée

Ayant fait une virée en librairie spécialisée BD récemment dans le cadre du travail, (rien de tel que d’entasser les livres sur un chariot quand on sait qu’on ne dépensera pas ses propres deniers !) j’ai dévoré pas mal de mangas et bandes-dessinées de tous horizons : en voilà un premier aperçu -le reste suivra sous peu j’espère !- avec trois BD jeunesse abordant des thématiques importantes (écologie, harcèlement scolaire, condition de la femme).


Aubépine T1 : Le génie Saligaud ; de Karensac & Thom Pico
Publié aux Éditions Dupuis, 2018 – 99 pages

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Prévue en quatre tomes -chacun se déroulant à une saison différente-, cette nouvelle série imaginée par Karensac m’a beaucoup enthousiasmée !

Pour raisons professionnelles les parents d’Aubépine décident de déménager dans un trou perdu à la montagne. Seulement voilà, il n’y a rien dans le coin, personne à qui parler et rien à faire… Pendant que sa mère s’efforce de trouver une solution pour protéger les oiseaux locaux (on notera le message écologique présent en fond, qui prône le respect de l’environnement et la préservation d’espèces menacées), Aubépine, elle, s’ennuie à cent sous de l’heure. Qu’à cela ne tienne, elle ira vagabonder dans les montagnes, où elle fera d’étranges rencontres ! Une mystérieuse bergère lui offre ainsi un chien à l’allure étrange, puis un mystérieux génie croise la route de la petite fille. Comme tout bon génie qui se respecte, il  propose de lui accorder trois voeux, ce qui, on s’en doute, va provoquer quelques bouleversements et entraîner les deux comparses dans une aventure tumultueuse ! (Surtout quand on réfléchit deux secondes à son nom -Saligaud- qui n’a pas été choisi au hasard !)

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On pourrait être tentés de rapprocher l’histoire des célèbres récits de Heidi, ou de Belle et Sébastien. Pourtant, Aubépine casse la baraque et brise complètement les clichés de la petite fille un peu perdue face à l’immensité à laquelle elle n’est pas habituée : son isolement forcé est simplement un très bon prétexte à la faire vivre des aventures rocambolesques !
Héroïne impertinente, râleuse, curieuse et obstinée, elle incarne un personnage auquel les enfants ne tarderont pas à s’identifier ! (moi-même, je l’ai adorée !)

Aubépine annonce un vent de fraicheur sur la bande-dessinée jeunesse ! Avec un scénario rythmé, une héroïne très charismatique, et le dessin à la fois pétillant et expressif de Karensac, l’album s’avère très réussi et entraîne les jeunes lecteurs dans une drôle d’aventure !


Chaque jour Dracula ; de Loïc Clément & Clément Lefèvre
Publié aux Éditions Delcourt, 2018 – 48 pages

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Vous le savez désormais, je porte une tendresse particulière aux bandes-dessinées scénarisées par Loïc Clément depuis ma découverte du brillant Le Temps des mitaines, de l’émouvant Chaussette et du rafraîchissant Les jours sucrés. J’attendais donc avec impatience sa prochaine parution !

Toujours plein d’inventivité, il imagine que Dracula, avant d’être l’une des figures emblématiques du vampire que l’on connait, a du, lui aussi, aller à l’école. Seulement, pas facile de fréquenter un établissement pour humains quand on a certaines particularités… Moqué pour son sérieux en classe et ses différences physiques, (canines proéminentes, lueur rouge dans les yeux, teint blafard qui lui évite les séances de sport) Dracula endure le pire jour après jour.

Violence à l’école, sentiment d’exclusion, honte d’en parler aux proches :  tout est amené avec finesse, en gardant une atmosphère légère et des touches d’humour qui contrebalancent le malaise ressenti face au harcèlement. Ainsi, l’auteur n’oublie pas d’accorder à son héros quelques moments de calme et de tendresse : l’amitié de sa camarade de classe Mina, les câlins avec sa chauve-souris apprivoisée, les discussion avec Vlad, papa poule de compétition etc.

Chaque jour Dracula véhicule un message positif quant aux situations de harcèlement : on laisse ici la vengeance de côté pour de trouver une autre solution à ce mal-être. L’auteur incite aussi à la tolérance en montrant qu’accepetr et cultiver sa différence est souvent la meilleure manière de faire face à ses bourreaux. 

Une fois de plus, Clément Lefèvre propose des planches d’une beauté singulière ! (rappelez-vous de son travail incroyable sur L’incroyable peur d’Epiphanie Frayeur) Les teintes employés donnent une ambiance onirique à l’ensemble, tandis que le dessin très expressif fait ressortir la fragilité du petit Dracula. Il ne lésine pas non plus sur les détails autour du folklore du vampire : cercueil en guise de lit, fantômes et squelettes vaquant dans le manoir, chauve-souris en guise d’animal de compagnie etc.

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☞ Très touchante par le sujet choisi et la manière dont il est traité, Chaque jour Dracula  peut s’adresser aussi bien aux enfants qu’aux parents, et permettra peut-être d’ouvrir la  discussion sur un sujet encore un peu tabou : le harcèlement scolaire. Porté par de superbes illustrations, c’est un album à mettre absolument entre toutes les mains !


Calpurnia ; de Daphné Collignon & Jaqueline Kelly
Publié aux Éditions Rue de Sèvres, 2018 – 90 pages

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Adaptation du roman éponyme de Jacqueline Kelly paru chez L’Ecole des loisirs, Calpurnia comportera apparemment deux tomes.

L’autrice nous amène quelque part au Texas à l’aube du 20e siècle. Là, dans une famille typiquement bourgeoise, Calpurnia, onze ans, se pose beaucoup de questions sur ce qui l’entoure. Seul son grand-père, un vieil homme taciturne et un peu excentrique, semble être à même de répondre à ses questions. Ne reste plus qu’à l’affronter pour qu’il accepte de l’initier aux mystères de la nature !

A mi-chemin entre la bande-dessinée, le roman graphique, et le carnet d’observations scientifiques, Calpurnia offre une réflexion intéressante sur la condition féminine de l’époque, l’adolescence et ses petits bouleversements, ainsi que sur la nature. J’ai d’ailleurs beaucoup apprécié la façon dont Daphné Collignon mélange le quotidien familial fait de secrets, d’amourettes et de petites disputes, aux recherches scientifiques qu’effectuent Calpurnia et son grand-père. 

A des kilomètres des clichés que l’on peut rencontrer, la jeune fille est une héroïne à la fois brillante, enthousiaste et curieuse de tout. A une époque où la société la prédispose à devenir une bonne épouse sachant simplement jouer du piano et broder comme il faut, elle sort des sentiers battus en décidant de se consacrer à l’étude de la nature.

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Les tons chaleureux et l’aspect vaporeux qui se dégagent des illustrations contribuent à faire de l’ouvrage un régal pour les yeux, le mélange BD/livre illustré rajoutant encore au plaisir ! 

☞ C’est un joli moment hors du temps que nous offre Daphné Collignon avec cette bande-dessinée tout public qui plaira aussi bien aux enfants qu’à leurs parents (on aurait bien tord de bouder son plaisir) ! Visuellement, chaque planche est un petit bonheur, et on se laisse facilement porter par cette histoire à la fois émouvante, drôle et passionnante. Vivement la suite !

Le Veilleur des brumes : un petit bijou !

Le Veilleur des brumes; par Robert Kondo & Dice Tsutsumi
Publié chez Grafiteen, 2018

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Au dessus de Val-de l’Aube se dresse le Barrage : une immense muraille de bois coiffée d’un moulin. Lui seul tient à distances les brumes mortelles qui ont englouti le reste du monde. Depuis la mort de mon père, je suis responsable du Barrage. Une bien grande responsabilité pour un petit garçon. Mais telle est ma mission. Je m’appelle Pierre. Je suis le veilleur des Brumes.

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La particularité de cette bande-dessinée, c’est qu’il s’agit de l’adaptation du court-métrage multi primé « The Dam keeper » dont je vous glisse le lien juste ici -bande de veinards- ! (Attention, risque de spoilers ceci dit !) Après la réalisation de ce petit film, Robert Kondo et Dice Tsutsumi ne se voyaient pas s’arrêter en si bon chemin, et ils ont eu raison ma foi !

Les auteurs ont tous deux fait leurs armes aux studios Pixar, notamment sur les films Toy Story 3 ou Monster University. Habitués aux univers forement marqués par leur direction artistique, ils ont su tirer partie de leur expérience et insuffler une dimension vraiment unique au Veilleur des brumes.
En tournant les pages, on a parfois du mal à réaliser que l’on est bien dans une bande dessinée : l’ambiance est complètement onirique, grâce à la colorisation employée et aux dessins un peu floutés. Le travail sur la lumière vaut complètement le détour, de même que les illustrations tout en rondeur qui caractérisent les personnages antropomorphes : une merveille à contempler page après page !

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Mais au delà de l’aspect visuel exceptionnel, c’est également la qualité du scénario qui fait de cette bande dessinée un must have ! 

Présentons d’abord Pierre : ce petit bout de cochon porte sur ses frêles épaules (oserais-je dire jambonneaux ? Allez, j’ose !) la responsabilité de toute la ville puisqu’il doit assurer l’entretien du moulin, la machine inventée par feu son papa pour garder les brumes éloignées… Eh oui, comme si ça ne suffisait pas à son malheur, il s’avère que Pierre est orphelin depuis que son paternel s’est jeté dans les brumes par désespoir  suite à la mort de sa femme. Vous suivez toujours ? Avec ça, Pierre vit donc seul et continue de fréquenter l’école où tout le monde l’ignore consciencieusement alors qu’il est pourtant le seul garant de leur survie #maisoùestlalogique.

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A ce moment-là j’étais à peu près dans cet état.

Suite à un évènement étrange, Pierre se retrouve avec deux de ses camarades à l’extérieur de la ville fortifiée, ce qui leur permettra d’en savoir plus sur ce qui se passe à l’extérieur. Ce qui débutait comme un récit fantastique nimbé de mystère prend alors la forme d’une quête initiatique aux multiples dangers (ben oui, parce qu’à l’extérieur de Val-de l’Aube, le monde a l’air dévasté et plein de phénomènes étranges.

Profondément émouvante, l’oeuvre arrive à intégrer des thématiques universelles comme le sentiment de rejet, le harcèlement, la résignation ainsi que la perte d’un être cher. Certaines scènes m’ont brisé le cœur, mais participent à la crédibilité attendue par les personnages.

Le Veilleur des brumes fait partie de cette tendance actuelle de la bande dessinée jeunesse à offrir aux enfants des oeuvres de qualités qui ne les prennent pas pour des neuneus (et c’est pas plus mal !). Ainsi, même si le titre est paru chez Grafiteen -la collection de BD pour ados de Milan- les aventures de Pierre sauront séduire tous les âges grâce à sa quête initiatique à l’ambiance sombre et aux dessins exceptionnels que proposent les auteurs.

☞ Audacieuse et grand public cette bande-dessinée fait partie des trésors que je chérirai et recommanderai à tout va autour de moi ! Elle a le mérite de tenir en haleine le lecteur par la découverte d’un univers un peu étrange, propose une aventure mystérieuse et une ambiance sombre comme on en voit peu en littérature jeunesse. Si on ajoute à ça la beauté de l’objet livre et la poésie qui se dégage des illustrations, je ne vois pas ce que vous attendez pour foncer chez votre libraire !

Y a pas de héros dans ma famille !

Y a pas de héros dans ma famille ; de Jo Witek
Publié chez Acte Sud Junior, 2017 – 133 pages

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☞ Qui n’a jamais eu honte de sa famille ?

Maurice Dembek, dit « Mo », a toujours cru naïvement que les autres enfants avaient, comme lui, deux vies bien séparées l’une de l’autre : celle à l’école où tout se doit d’être ordonné, où la politesse et le bien parlé règnent, et celle à la maison où ça braille dans toutes les pièces, où il y a toujours du monde qui s’invite. 

« Avant, je pensais que les enfants du monde entier étaient comme moi. Des mini-humains qui deux fois par jour et cinq jours par semaine passent la frontière d’un pays à l’autre, le cartable sur le dos et le sourire en bandoulière. Avant, ma vie gambadait légèrement entre le monde de l’école et celui de la maison. J’étais heureux dans mes deux pays bien distincts avec des gens différents, des styles différents, une cuisine et une langue particulières. »

Seulement voilà, le jour où son copain Hippolyte s’invite pour faire un exposé, tout bascule. Parce que chez les Castant, la maison est calme, immaculée, et surtout il y a un mur entier de photos de famille, dont plusieurs font figure de « héros » grâce à leur carrière ou l’obtention d’un Prix Nobel.

Pour Mo, c’est un véritable choc : sa famille, elle, ne comporte pas un seul « héros », ce serait plutôt une bande de zéros… Pire encore, à travers le regard d’Hippolyte, il prend conscience que sa famille est atypique, presque dysfonctionnelle !

☞ De zéro en héros

Dans la famille de Mo, je demande donc le héros. Et c’est qu’elle est étendue la tribu Dambek  ! Entre le père, qui travaille au noir avec un copain, les deux chiens de la famille, Titi le frère avide de sensations fortes en voiture et toujours prêt à se fourrer dans de sales coups, Gilou le frère deux de tension, Bibiche la soeur peste qui chante comme une casserole, Mo le vilain petit canard, et puis la mère qui porte tout ce petit monde à bout de bras, il y a de quoi faire !

D’ailleurs, la mère de Mo est sans doute le personnage qui m’a le plus émue dans tout le roman : elle donne sans compter à ses proches, qui ne se rendent pas toujours compte des sacrifices qu’elle a du faire pour sa famille ! Toujours rassurante, elle a un caratère amusant et n’a pas la langue dans sa poche.

« J’ai arrêté l’école pour aider ma famille. Gagner des sous. Tu comprends, Mo ? Et aujourd’hui je travaille à la maison. C’est peut-être pas un vrai travail, mais pour moi, c’est important. Le plus important, même. »

L’exploration, en famille, des albums photos révèle des histoires de gens pas si ordinaires qu’en apparence, rassurant Mo, et lui donnant l’occasion de redécouvrir sa drôle de famille oh combien généreuse.

☞ Une belle leçon de vie

A grand coup de rires et avec une grande sensibilité, Jo Witck dresse le portrait d’une famille unie qui émeut à coup sûr le lecteur par sa tendresse et son amour.

Même au delà de ça, elle montre que les héros ne sont pas toujours ceux que l’on croit : nombreuses sont les personnes oeuvrant dans l’ombre ou l’indifférence générale pour le bien des autres.

« Je sais que les vrais héros sont ceux que les gens aiment, mais aussi ceux qui savent aimer. Ceux qui rendent les autres plus forts, au lieu de se croire les plus forts. »

☞ Ce roman jeunesse a tout de la petite pépite, à mettre rapidement entre les mains des enfants à partir de 10 ans ! L’autrice a su mettre des mots justes sur le contexte social/familial de Mo, véhiculant au passage un joli message de tolérance. Elle signe un très joli roman d’apprentissage sur les liens familiaux, montrant l’importance de connaître son passé pour mieux appréhender son présent.

Histoires musicales pour petites oreilles♫

Sur les conseils d’une collègue, j’ai récemment écouté/regardé deux nouveautés jeunesse qui étaient arrivées à la médiathèque. Si je ne suis pas particulièrement friande des histoires illustrées et racontées sur CD en paralèlle (en plus, je n’ai pas d’enfants !), je suis pourtant tombée sous le charme de ces deux opus édités par Acte Sud, qui feront d’excellents cadeaux pour les enfants de votre entourage ! 


Allô docteur Ludo : comédie médicale ; de Olive et moi
Raconté par François Morel & illustré par Arnaud Boutin

Acte Sud Junior, 2012 – 48 pages
[A partir de 5 ans]

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Le docteur Ludo est doudoutologue : il ne soigne pas les humains, mais les jouets, les peluches, les robots, les poupées… C’est un médecin réputé ; tous les mercredis, sa salle d’attente est pleine à craque. Parfois, il s’y passe des choses vraiment bizarres… 

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L’histoire à la fois loufoque et intelligente présente plusieurs niveaux de lecture, ce qui satisfera aussi bien les enfants que leurs parents qui devraient saisir les jeux de mots et les références présentes dans le texte. 

On alterne entre lecture narrative et musique, et tout y est parfait : François Morel fait un narrateur remarquable, et les chansons -au nombre de cinq- sont rythmées et entraînantes, avec des paroles sensées. 

Signalons également les illustrations naïves et colorées de Arnaud Boutin, qui accompagnent parfaitement le ton humoristique de l’histoire !

Pour moi, l’ouvrage est accessible dès 5 ans (ça risque d’être compliqué avant niveau compréhension), jusqu’à pas d’âge ! Bref, à écouter sans modération, même si l’album n’est, à priori, pas remboursé par la Sécu 😉 

 


Un petit deuxième pour la route ? 😉


Le stylo à cancre ; de Olive et moi
Raconté par François Morel & illustré par Elisa Gehin
Acte Sud Junior, 2008 – 48 pages
[A partir de 5 ans]

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Moi c’est Simon. J’ai toute une classe de peluches et d’animaux qui m’attend à mon retour de l’école. Dans ma chambre, c’est moi le maître, le prof, le super héros. Sauf que mes élèves m’en font voir de toutes les couleurs… Pas étonnant que je sois fatigué !

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Là encore, Olive & moi nous offre une histoire touchante et originale : les calembours et sous-entendus sont irrésistibles et font de ce livre-CD un petit bijou à offrir tout autour de soi !

Côté chansons les airs restent bien en tête, se retiennent vite, et rythment agréablement l’histoire lue par François Morel, dont l’interprétation est décidément impeccable. Si l’ensemble m’a un peu moins séduite que Allô docteur Ludo, reste qu’on  regrette presque qu’il n’y ait pas d’avantage de chansons sur chaque histoire !

Attention cependant, toutes les fantaisies de Simon pourraient bien donner des idées aux plus jeunes, car le garçon est très inventif quand il s’agit d’enseigner dans sa classe fictive : dissection de Pokemon, élevage de poux, dictée de mots d’excuses… autant de matières qui n’ont pas leur place à l’école traditionnelle. 

Les mystères de Larispem : un mélange détonnant !

Les mystères de Larispem T1 : Le sang jamais n’oublie; de Lucie Pierrat-Pajot
Gallimard  Jeunesse, 2016 – 260 pages
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Dans cette Cité-État indépendante où les bouchers constituent la caste forte d’un régime populiste, trois destins se croisent…  Liberté, la mécanicienne hors pair, Carmine, l’apprentie louchébem et Nathanaël, l’orphelin au passé mystérieux. Tandis que de grandes festivités se préparent pour célébrer le nouveau siècle, l’ombre d’une société secrète vient planer sur la ville.
Et si les Frères de Sang revenaient pour mettre leur terrible vengeance à exécution ?

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Lauréat de la deuxième édition du Concours du Premier Roman Jeunesse organisé par Gallimard Jeunesse, Télérama et RTL, Les mystères de Larispem a su se démarquer grâce à l’originalité de son récit et la richesse de son univers.

Après tout, il fallait y penser à cette uchronie ! Dans cette version de l’Histoire, la Commune de 1871 a été un grand succès, permettant aux Communards de prendre le pouvoir et de bannir les aristocrates. Désormais, c’est l’égalité pour tous qui prévaut, Paris est devenue la Cité-Etat de Larispem et a affirmé son indépendante du reste de la France.

Au lecteur de se familiariser avec cet univers au fil des pages : se réapproprier les noms des rues, apprendre que la Tour Eiffel n’a jamais été construite mais qu’une Tour Verne existe…!

On appréciera de suivre tour à tour chacun des trois jeunes héros : Liberté, Carmine et Nathanaël, dans leur quotidien. Quotidien qui paraît assez banal de prime abord. Pourtant, Carmine, apprentie louchébem (=boucher) n’hésite pas à commettre des cambriolages la nuit en compagnie de Liberté, jeune mécanicienne de talent et peu sûre d’elle. Quant à Nathanaël, il est orphelin et n’a presque jamais mis les pieds dehors, mais croit déceler un mystère dans son orphelinat et décide de mener discrètement l’enquête. Tous les personnages sont assez bien construits, même si j’ai trouvé qu’il leur manquait un peu de profondeur. Ceci dit, ils sont d’un naturel optimiste et insouciant, assez pour que le lecteur s’identifie à eux.

Ici, les codes de la littérature jeunesse sont bien présents et très respectés, ce qui fait des Mystères de Larispem un roman estampillé “jeunesse”, là où La Passe-Miroir pouvait se lire à tout âge et séduire également un public adulte. Ceci dit, ce n’est pas un réel défaut, mais le fait que ces deux romans soient lauréats du même concours pousse inévitablement à la comparaison !

Ce premier tome est donc surtout une grande introduction à l’univers si particulier que nous propose l’auteur. Lucie Pierrat-Pajot nous plonge dans une intrigue captivante, mêlant habilement le côté historique à une pointe de fantastique, le tout dans une merveilleuse ambiance steampunk. On suit avec plaisir les pensées des trois personnages principaux en même temps que l’on découvre le fonctionnement de Larispem. Bref, Le sang jamais n’oublie constitue le premier tome d’une trilogie qui s’annonce assez unique en son genre !

En bref :
– un univers unique
  – de jeunes héros attachants
  – le mélange de plusieurs genres, très bien mené

 


Un petit mot sur le 2ème tome ? 


 

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Au début du XXe siècle, les grands jeux de Larispem sont organisés. Carmine, Louchébem et Nathanaël forment l’une des six équipes. Mais ils font aussi face à la redoutable comtesse Vérité, qui manoeuvre en secret pour s’emparer de la Cité-Etat. Ils doivent pour cela déchiffrer le livre de Louis d’Ombreville.

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Après avoir découvert le très surprenant premier tome de la série, il me tardait de dévorer la suite ! 

Tandis qu’ils s’accomplissent chacun au niveau professionnel, nous retrouvons Carmine, Nathanaël, et Liberté dans une alliance très attendue dans le cadre de leur participation aux Jeux du siècle. Inutile de dire que de nombreuses péripéties les y attendent, et qu’on cherchera à leur mettre des bâtons dans les roues ! 

En parallèle de cette grande aventure, d’étranges évènements se produisent dans la Cité-Etat. Les Frères de Sang sont décidés à faire parler d’eux, et menacent la paix de Larispem, à travers plusieurs sabotages d’automates et menaces publiques. Le roman prend alors une tournure plus sombre et l’on apprend ainsi à connaître cette association inquiétante qui gravite autour de nos  trois héros.

Si l’on retrouve le mélange de magie, d’histoire et de complots, qui faisait tout le charme du premier opus, ce tome-ci est beaucoup plus tourné vers l’action.
L’un des points forts de la saga, reste, bien sûr, son contexte si original : quel plaisir de découvrir un Paris entièrement revisité, indépendant du reste du pays, et d’admirer la suprématie technologique de Larispem !

A côté de ça, les personnages sont pour beaucoup dans la réussite de la série : notre trio se révèle de plus en plus, et certains protagonistes m’ont agréablement surpris. Liberté, notamment, s’affirme complètement, et j’ai trouvé le personnage de Nathanaël très agréable dans ce nouvel opus, lui qui ne m’avait pas forte impression dans l’introduction.

Il n’y a pas à dire, Lucie Pierrat-Pajot confirme son talent avec ce nouveau livre, à travers une plume fluide, un univers unique et une grande imagination ! Après un premier tome très introductif, le lecteur rentre dans le vif du sujet, et va de rebondissement en rebondissement. Les nombreuses révélations de l’auteure, ainsi que la conclusion du roman, qui nous laisse méchamment sur notre faim, ne peuvent que donner envie de poursuivre l’aventure aux côtés de Carmine, Liberté et Nathanaël !

Emma et Capucine T1 : un rêve pour trois

Emma et Capucine T1 : un rêve pour trois; par Jérôme Hamon & Lena Sayaphoum
Publié aux Editions Dargaud, 2017

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Emma et Capucine sont soeurs et partagent un rêve : entrer ensemble dans la prestigieuse école de danse de l’Opéra de Paris pour devenir danseuses étoiles. Capucine passe les premières auditions avec succès. Pas Emma… et le monde de la jeune fille s’écroule. Mais sa vocation n’est-elle pas ailleurs ?

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√ J’ai apprécié :

☞ La découverte d’un milieu particulier -la danse classique-, et les coulisses des concours, notamment les conditions d’accès au prestigieux Opéra de Paris.

Les relations entre les différents personnages sont bien retranscrites, et loin d’être lisses, elles apportent une certaine profondeur à l’histoire : je pense en particulier  au lien qui unit Capucine et Emma. 

☞ Si l’histoire est tournée en priorité vers la danse, Jérôme Hamon y traite aussi d’autres thèmes centraux de l’adolescence, comme les conflits familiaux, les premiers émois amoureux, ou la pression autour du parcours scolaire.

☞ Le personnage d’Emma, qui attire tout de suite la sympathie. Tour à tour tiraillée par sa mère sur son avenir de danseuse, puis résignée, elle se rend maître de son destin. Au contraire, Capucine, reste plutôt sur la touche dans ce premier opus. Espérons que la suite de leurs aventures la mettra plus à l’honneur !

☞ Les jolis graphismes quasi-photographiques, dans les tons pastels, très doux et lumineux à l’œil, sont un vrai régal pour les yeux !

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Emma et Capucine est une jolie bande dessinée, plutôt à destination des adolescentes par les sujets qu’elle aborde, qui véhicule un beau message sur les rêves et les espoirs de chacun. Les illustrations de Lena Sayaphoum subliment cette tranche de vie, dont on a déjà hâte de lire la suite !

Focus sur : Amélie Fléchais

Pas de sélection aujourd’hui ! Une fois n’est pas coutume, j’ai décidé de vous présenter le travail d’une illustratrice que j’aime d’amour, et trop peu connue à mon goût : Amélie Fléchais.

Illustratrice et auteure de bandes-dessinées et d’albums jeunesse, la jeune femme a plusieurs cordes à son arc, puisqu’elle travaille également dans le domaine de l’animation ! Avec quatre œuvres au compteur pour le moment, et dotée d’une pâte graphique très reconnaissable, Amélie Fléchais vous en mettra pleins les mirettes 😉 

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Publié aux Editions Soleil (Collection Métamorphose)
[A partir de 8 ans]

D’une originalité folle, c’est avec cette bande dessinée hors-norme que j’ai découvert le travail de l’auteure !

Trois enfants se perdent en forêt alors qu’ils empruntent un raccourci dans le cadre d’une chasse au trésor. Ils pénètrent alors dans un monde totalement loufoque qui n’est pas sans rappeler celui d’Alice aux Pays des merveilles, mais dont l’ambiance sombre et inquiétante se rapproche aussi de certains contes de Grimm. 

« Dans l’obscurité, elle courut aussi vite qu’elle put, mais déjà une triste fin l’attendait.
La forêt ne relâche, en effet, pas si facilement ce qui lui appartient… »

« On raconte que loin du monde des Hommes s’étend une forêt cruelle et mystérieuse. Elle appâte en son sein les voyageurs égarés à la recherche d’un foyer, afin de les dévorer pour l’éternité. »

Le graphisme de l’ouvrage ne peut laisser le lecteur indifférent tant il est original et hors norme. Des planches aux couleurs douces côtoient ainsi des pages entières de noir et blanc : on a l’impression de subir les caprices graphiques de l’auteur, qui nous impose des styles et des influences japonaises et nordiques bien différentes… c’est sans doute un côté déstabilisant de l’album, mais on se laisse gagner par l’étrangeté de l’univers créé par Amélie Fléchais, plein de charme et de poésie !

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Pour plus d’infos sur la genèse de Chemin perdu, les inspirations de l’auteure, et sa manière de travailler, je vous conseille vivement cet article paru sur Madmoizelle.com, qui contient notamment une interview d’Amélie Fléchais !

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Le Petit loup rouge
; 80 p.

Publié chez Ankama Editions
[A partir de 8 ans]

Amélie Fléchais propose ici une énième réinterprétation du célèbre conte de Perrault : Le Petit Chaperon rouge.

L’histoire est celle d’un petit louveteau, envoyé par sa maman à travers la forêt afin d’apporter de la nourriture à sa grand-mère mal en point. Attiré par plusieurs distractions hors du sentier qu’il doit suivre, il ne tarde pas à se perdre, mais rencontre une jeune fille adorable qui lui promet de l’aider à retrouver son chemin. (mouais, on y croit tiens…!)

« Fais bien attention à éviter la forêt de bois morts où vivent le chasseur et sa fille. Ils sont vifs, cruels et détestent les loups ! Je ne veux pas qu’il t’arrive malheur, alors ne t’aventure surtout pas là-bas ! »

En inversant ainsi les rôles des personnages, l’auteure donne ainsi une toute autre dimension au récit, tout en conservant l’ambiance sombre des contes originaux. Elle montre que le méchant n’est pas toujours celui que l’on croit, et mêle habilement les thèmes du mensonges et des préjugés, tout en abordant aussi la question du deuil. 

Quant à ses dessins, tous plus somptueux les uns que les autres, ils appellent à pénétrer dans l’univers féerique qu’elle nous présente. Constituées de multiples détails, et de couleurs chatoyantes, les illustrations vont de paire avec le texte, auquel elles apportent une grande poésie.

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L’homme montagne

Publié aux Editions Soleil (Collection Métamorphose)
[A partir de 8 ans]

Pour ce très bel album pour la jeunesse, Amélie Fléchais n’est cette fois qu’illustratrice, et laisse le scénario aux mains de maître de Séverine Gauthier (dont j’apprécie aussi beaucoup le travail, notamment avec L’épouvantable peur d’Epiphanie FrayeurCœur de pierre, ou encore Garance).

« Ecoute, je porte sur mon dos, les montagnes du monde, et mon front s’est creusé de tous les sentiers sur lesquels j’ai marché. Tu peux entendre dans ma voix les grondements de la terre, tu peux voir dans mes yeux l’eau de toutes les mers… »

La montagne qui a poussé sur son dos étant trop lourde à porter, un grand-père annonce à son petit-fils qu’il part pour un ultime voyage, un voyage qu’il doit accomplir seul. Le petit ne comprend pas, cherche une solution, et un plan apparaît dans son esprit : partir en quête du vent le plus puissant, qu’on trouve sur les montagnes les plus hautes, pour aider son ancêtre. Lui faisant promettre de l’attendre, commence alors une fabuleuse aventure pour ce petit bonhomme courageux. 

L’Homme montage, c’est un très beau conte initiatique , une jolie métaphore de la vie et de ses embûches, ainsi que du deuil. Au lieu de d’aborder la question de manière frontale, Séverine Gauthier choisit l’onirisme pour en parler avec une grande délicatesse. Les aventures du petit garçon apparaissent comme un voyage presque philosophique à travers ses rencontres avec le roi des bouquetins, les cailloux ou l’esprit de l’arbre… des rencontres farfelues qui vont l’aider à grandir et accepter l’absence de l’être cher.

« –Grand-père, comment es-tu toujours si sûr qu’on se retrouvera ?
Parce que mon plus beau voyage, c’est toi. »

Si ce conte s’adresse aux enfants à la base, il plaira certainement aux adultes grâce à la grande poésie qui s’en dégage. Côté graphismes, Amélie Fléchais nous livre une fois de plus de superbes planches à l’univers enchanteur ! Son travail sur les couleurs et la lumière est tel que chaque planche a chamboulé mon cœur…  Jugez plutôt : 

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Bergères Guerrières

Publié aux Editions Glénat
[A partir de 8 ans]

Le pitch est le suivant : à cause de la guerre, un petit village s’est vu dépeuplé de tous ses hommes, et ce sont les femmes qui gèrent tout, y compris la défense du territoire. Pour ça, un ordre exclusivement féminin a été mis en place : celui des Bergères Guerrières. Redoutables combattantes, elles n’acceptent que la crème de la crème dans leur rangs, et les apprenties doivent en baver avant de passer Bergères confirmées !

Qu’on se le dise, je suis tombée en amour devant le personnage de Molly (la petite rouquine de la couverture) dès les premières pages. Avec sa bouille déterminée et son caractère de cochon, la demoiselle a tout pour plaire ! Fraîchement acceptée comme Apprentie bergère, elle devra faire ses preuves et s’entraîner dur pour protéger son village. 

Molly
Matez-moi ce regard, ça rigole pas les gars

Bien que l’histoire se déroule sur une terre imaginaire (dont on a d’ailleurs une très jolie représentation sur carte en début d’album), tout est fait, je trouve, pour rappeler la culture celtique ou viking. Ainsi, certains détails architecturaux, associés à l’ambiance un peu médiévale de l’univers, m’ont vraiment fait penser au film d’animation Rebelle !

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Même au niveau des paysages, on se rapproche vraiment de pays comme l’Irlande et l’Ecosse : de la flotte, la mer à flanc de falaises, des zones rocailleuses et de vertes étendues.  Tout cet univers celtique, en plus d’être dépaysant, offre un formidable terrain de jeu aux auteurs, qui s’inspirent des légendes celtiques pour offrir au lecteur une jolie aventure sur fonds de fantastique. 

Graphiquement, on reconnait bien le coup de crayon d’Amélie Fléchais, même si ses illustrations sont ici plus réalistes que dans ses précédents albums, tous empreints d’un doux onirisme. Sa touche particulière sur la couleur et les lumières se retrouve malgré tout dans les paysages. Quant aux personnages, ils sont tous très expressifs, à tel point que certains visages m’ont fait pouffer de rire !

Bref, difficile de ne pas sautiller d’enthousiasme devant ce très chouette album qui met le travail des femmes en avant ! Les auteurs y introduisent un noyau de personnages que l’on prend plaisir à suivre, une vallée pleine de mystères que l’on a hâte de percer, et surtout, ils mettent en avant des valeurs universelles qu’il est bon de véhiculer. La bonne nouvelle, c’est que trois tomes sont au prévus ! De quoi voir l’évolution de nos apprenties bergères préférées, et sans doute découvrir ce qui se cache dans la brume… 

☞ C’est tout pour cet article, que j’ai pris beaucoup de plaisir à rédiger 🙂 Si vous ne connaissiez pas le merveilleux travail d’Amélie Fléchais, j’espère vraiment vous avoir donné envie de parcourir ses livres. Autrement, n’hésitez pas à me dire quel est votre album chouchou parmi ceux que j’ai présenté ! 

Et pour vous tenir au courant de ses nouvelles publications, par ici la compagnie ! ➡️
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Poulpe Fictions : des romans drôles et pétillants !

Poulpe Fictions, c’est cette toute nouvelle maison d’édition spécialisée dans les publications pour les 9-12 ans, qui promet des textes à la fois engagés et drôles : de quoi faire le bonheur des futurs lecteurs ! Petit bonus pour les enseignants : chaque roman paru fait l’objet d’une fiche pédagogique à télécharger librement sur le site de Poulpe Fictions !

Ayant reçu deux de leurs titres dans un office, je me suis empressée de les lire pour m’en faire un avis et pouvoir ainsi les conseillers à mes petits lecteurs.


Viser la lune ; de Anne-Fleur Multon
Publié chez Poulpe Fictions, 2017 – 168 pages

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Aliénor, Itaï, Azza et Maria ont 14 ans et habitent chacune aux 4 coins de la planète, mais de leur rencontre sur un forum, naissent tout à la fois une grande amitié ET une chaîne Youtube à succès ! Des vidéos sur l’astronomie, par Aliénor, aux conseils d’Itaï en jeu vidéo, d’Azza en pâtisserie et de Maria en photo, les filles partagent leurs passions et voient grossir leur confiance et leur communauté. Quand Itaï se voit écartée d’un championnat d’e-gaming prétendument masculin, elles ont l’outil en main pour médiatiser l’affaire et lutter contre cette injustice !

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Dans Viser la lune, Anne-Fleur Multon présente sa vision de la jeunesse actuelle, à travers l’amitié naissante de quatre jeunes adolescentes.
Très inspirantes chacune à leur manière, elles sont enthousiastes, pleines d’envies et de rêves, et se donnent les moyens de les réaliser. Aliénor, Itaï, Azza et Maria semblent tellement réelles, qu’il ne sera pas difficile aux jeunes lectrices de s’identifier à l’une d’entre d’elle, que cela soit dû à sa personnalité, ou encore à ses intérêts.
Effectivement, le roman évoque tour à tour -mais sans vraiment les développer- certains domaines de prédilections des adolescents, notamment les tutoriels maquillage, la cuisine, les jeux vidéos, ou la culture de manière plus générale.

Quel plaisir de pouvoir dire d’un livre jeunesse qu’il ne prend pas les filles pour de gentilles nunuches !

Ce roman, à l’image de ses protagonistes, est synonyme de diversité, et s’inscrit dans son époque. L’auteure y aborde en effet de nombreux sujets qui parleront aux adolescent(e)s d’aujourd’hui : les avantages mais aussi les dérives des réseaux sociaux et d’Internet en général, ou encore les injustices courantes du racisme et du sexisme. 

Côté style, on a quelque chose de frais et léger, de pétillant, ce qui s’accorde naturellement aux illustrations modernes de Diglee !

Viser la lune donne le ton et propose une histoire des plus actuelles, avec quatre figures féminines inspirantes et attachantes, qui poussent les jeunes lecteurs à croire en leurs rêves : c’est quand même un joli message à véhiculer. Ce premier tome est donc une réussite, de son écriture fluide à sa positive attitude, et je ne doute pas qu’il rencontrera un franc succès parmi les jeunes adolescentes en quête d’un modèle !

En bref, ce roman c’est :
– des thèmes proches des préoccupations des jeunes d’aujourd’hui
– un quatuor de personnages haut en couleurs
– une vision féministe bienvenue


Tarzan, poney méchant ; de Cécile Alix
Publié chez Poulpe Fictions, 2017 – 168 pages

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« Je me suis fait avoir sur toute la ligne ! Mon ami Noé a déménagé et sa famille m’a collé en pension au club des Edelweiss, un endroit abominable ! Rempli de stars à crinières tressées et de ponettes à leurs mémères !
Tout ça me rend vraiment… méchant ! Et les choses ne s’arrangent pas quand on m’inflige Jeanne, la pire cavalière qui soit, et qu’on m’oblige à partir en randonnée avec cette maladroite hargneuse sur le dos… « 

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Tarzan poney méchant, c’est un peu dans la même veine que les génialissimes publications de la collection Pepix de Sarbacane : truculent !

Tarzan, c’est lui qu’on voit sur la couverture : 1m43 au garrot, la crinière en bataille, l’air fier et indomptable…ou presque. Et il faut bien avouer que cet équidé campe un merveilleux personnage de roman jeunesse !
Bougon au possible quand il se retrouve, bien malgré lui, en pension dans un centre équestre, les petits et grands lecteurs s’amuseront de ses nombreuses stratégies élaborées dans le but de se carapater de cet enfer, ainsi que de son air de poney rebelle ! 

D’ailleurs, si le propos de Cécile Alix fait sourire à toutes les pages, le travail d’illustrateur de Louis Thomas contribue beaucoup à l’atmosphère légère qui se dégage de l’ensemble : et pour cause, comment résister à la bouille adorable de ce poney au grand cœur ? 

Comme dans d’autres journaux intimes rédigés par des animaux (Le journal de Gurty notamment !), les chapitres courts, l’interlignage important et les illustrations cocasses qui parsèment le texte sauront encourager les bambins dans leur lectures. 

Râleur et obstiné, Tarzan séduira son lectorat, qui aura bien du mal à lâcher ses aventures aux Edelweiss !  

En bref, ce roman c’est :
– un narrateur doté d’un sacré caractère
– une histoire déjantée, mais mignonne


Que ce soit par leur ligne éditoriale, leur mise en page ou leur contenu attractif et toujours humoristique, difficile de ne pas rapprocher Poulpe Fictions de la collection existante Pepix !

Vous l’aurez compris, ce nouveau label à su me séduire avec ces deux titres bien différents l’un de l’autre. Je ne doute pas que les publications à venir seront tout aussi réussies : en tous cas, pas de doute, je les commanderai bel et bien pour le rayon jeunesse de la médiathèque ! 

Super Sourde

Super Sourdepar Cece Bell
Publié aux Éditions Les Arènes, 2015

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A la suite d’une méningite, Cece Bell perd l’audition à l’âge de quatre ans. Devenue illustratrice pour la jeunesse, elle raconte dans cette bande dessinée autobiographique son enfance marquée par la différence. Se faire des amis, jouer, apprendre…, tout est différent quand on est sourde et que cela se voit. A l’école, Cece porte un appareil auditif imposant. Pour affronter le monde qui l’entoure – pleinement entendant, lui – et accepter son handicap, elle s’invente un personnage de super-héros : Supersourde.

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√ J’ai apprécié :

☞ Le récit est largement autobiographique et Cece Bell parle de son vécu sans pathos, avec beaucoup d’émotion et de sincérité. Une touche d’humour rend le récit bien plus optimiste et supportable que la lecture, par exemple, de la vie d’Helen Keller. 

☞ La surdité reste le thème principal de la bande-dessinée, mais bien d’autres sujets universels sont traités : la peur du rejet des autres, les premières amitiés, les relations familiales… des thèmes qui parleront d’autant plus aux enfants, à qui se destine, à la base, cet album !

Cece est une petite fille très attachante, que l’on suit dans toutes les étapes de son handicap : du diagnostic à l’apprentissage d’une nouvelle vie, en passant par la frustration et le rejet. Mais ce que je retiens surtout, c’est la manière dont elle va transformer sa différence en force en devenant une super héroïne aux yeux de ses camarades !

☞ Si l’album s’adresse plutôt à un public jeunesse, je ne peux qu’encourager tous les adultes à se le procurer : le propos y est très enrichissant ! J’y ai beaucoup appris sur ce handicap dont on parle assez peu, de la lecture labiale (lecture sur les lèvres) à l’utilisation des différents appareils auditifs. 

☞ Les dessins assez naïfs et enfantins de Cece Bell accompagnent parfaitement le récit, dans de jolies couleurs pastelles. Son choix de donner à tous les personnages l’apparence d’un lapin (sans doute pour mettre leurs oreilles en avant ?) fonctionne très bien et renforce le côté doux et tendre de l’album. 

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Planche trouvée sur le site BDZoom

Très émouvant, Super sourde est un roman graphique des plus étonnants ! Véritable pépite du genre, c’est une BD à mettre entre toutes les mains, petites ou grandes, pour essayer d’ouvrir les mentalités sur les situations de handicap.

 

Roller Girl

Roller Girl; par Victoria Jamieson
Publié aux Éditions 404, 2016, 240 p.

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Astrid, 12 ans, est inséparable de sa meilleure amie, Charlotte. Jusqu’au jour où elle découvre le Roller Derby. Astrid devra alors apprendre à surmonter ses craintes et s’entraîner dur pour devenir une véritable Roller Girl !

 

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√ J’ai apprécié :

☞ La découverte du roller derby, encore peu pratiqué en France, mais très populaire aux États-Unis. On se familiarise en même temps qu’Astrid avec les règles propres à ce sport exclusivement féminin, ainsi qu’avec l’univers (tatouages, tenues vestimentaires) qui va de pair !

☞ Les thématiques abordées : si la BD a vocation à mettre ce sport en avant, elle parle aussi du passage complexe à l’adolescence, notamment la relation changeante enfant-parent ou les amitiés qui évoluent. Astrid est à un âge de doute, où rien ne semble acquis, et tout est soumis au questionnement, que ce soit son identité profonde, ou sa relation aux autres.   

☞ Le caractère fort de l’héroïne : si Astrid vit des moments difficiles au début, la pratique du roller derby l’aide énormément. Persévérante, elle puisera au fond d’elle même pour être en mesure de progresser assez pour pouvoir jouer un match.

☞ Un hymne au girl power ! Avec leur féroces expressions et leurs cris de guerre, ces patineuses sont un véritable modèle féminin qui devraient inspirer plus d’une lectrice !

☞ Les dessins sont, certes, simples, mais ils retranscrivent très bien les émotions des différents personnages.

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Roller Girl est une lecture qui reste en tête, tant on est marqué par la découverte de cet univers atypique. A travers ses graphismes efficaces, la vision féministe qu’il délivre et sa manière d’encourager le dépassement de soi, ce roman graphique s’est avéré être une belle surprise, que je recommande à toutes de lire !