Les Geôliers : le roman qui donne l’impression d’un bad trip !

Les Geôliers; de Serge Brussolo
Publié aux Éditions Folio SF, 2017 – 491 pages

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Il y a quinze ans, Debbie Fevertown s’échappait de Dipton après avoir tué sans pitié son mari et ses deux fils. Aujourd’hui, Jillian Caine est engagée par le réalisateur Dieter Jürgen pour écrire le scénario d’un biopic retraçant la vie de la meurtrière.
Jill rencontre des gens qui ont connu Debbie et ont partagé son quotidien, se rend sur les lieux du crime et découvre que la réalité n’est peut-être pas celle que les médias ont décrite à l’époque. Quels mystères recèle l’étrange ville de Dipton ?

 

Lu dans le cadre du Prix Imaginale des bibliothèques, ce roman -ma première découverte de la plume et l’univers de Serge Brussolo- reste à ce jour, je crois, l’expérience de lecture la plus perturbante que j’ai eue ! Le roman m’a interpellée à plusieurs reprises, et même plusieurs jours après l’avoir terminé, je ne suis toujours pas sûre d’avoir les mots pour le qualifier (du coup j’ai truffé cet article de gifs pour que la pilule passe mieux 😉 ).


☞ L’antichambre de l’enfer


« Il connaît la devise des Geôliers : rien ne doit entrer, rien ne doit sortir »

Imaginez une bourgade américaine coupée de tout, en bordure de forêt. Là-bas vous ne trouverez aucun accès internet ou mobile, mais des traditions ancestrâles vis à vis des arbres, et d’étranges bûchers disséminés ça et là en ville. Les habitants protègent farouchement leur communauté très fermée et flirtent avec l’obscurantisme. Ca y est, vous y êtes ? Bienvenue à Dipton ! (Vous restez, non ?)

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On mélange et ça donne ?…du Brussolo !


Du thriller au surnaturel il n’y a qu’un pas, que l’auteur franchit aisément. Les Geôliers est donc un roman hybride que l’on peine à qualifier : une louche de thriller, un soupçon de science-fiction et une bonne pincée de fantastique feraient-elles l’affaire ? 

A ma grande surprise, l’enquête autour du meurtre commis par Debbie Fevertown ne représente au final qu’une partie infime du roman, et Serge Brussolo ne tarde pas à laisser place à l’action : tournage à Dipton, relations tendues avec les locaux jusqu’à ce que tout dérape.

Mais quelle imagination foisonnante ! Sans spoiler quoique ce soit, si vous ouvrez Les Geôliers, vous aurez droit à un discours sur les extraterrestres, à un mystérieux culte autour des arbres, à une communauté étrange coupée du reste du monde, et à des monstres grotesques, rien que ça !

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Une progression contrastée


Si j’ai peiné à m’immerger dans l’histoire, le mystère s’épaissisant autour de Dipton m’a pourtant happée au bout de quelques chapitres. La mise en place peut paraître lente, mais les péripéties ne tardent pas à s’enchaîner, et la tension narrative qui s’installe subtilement est telle que je n’ai pas pu faire marche arrière avant d’avoir le fin mot de l’histoire ! 

Ajoutez à ça l’ambiance lourde -presque malsaine par moments- qui s’insinue au fil des pages, et vous aurez une idée de mon état pendant la lecture :

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☞ Rêve ou réalité ?


Les Geôliers est de ces romans qui mettent à mal la perception du réel ! Si la première partie du roman est la plus réaliste, Serge Brussolo en profite aussi pour nous faire douter de tout… Ainsi, les témoignages recueillis par Jillian dans le cadre de son enquête prennent des allures d’élucubrations de cinglés tandis que le doute s’installe en même temps chez l’héroïne. Délire paranoïaque ou  vérité monstrueuse ? C’est la question qui taraude le lecteur pendant presque 500 pages 😉 

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Ça vous rappelle quelque chose ?

☞ Comportements humains


C’est finalement une belle étude sociale à laquelle nous convie l’auteur : tous les personnages du roman sont surprenants à leur manière, et plus complexes qu’il n’y paraît au premier abord.

Dieter, par exemple, est certainement le protagoniste le plus loufoque, malsain et fantasque du récit. Il représente à lui seul bon nombre de déviances humaines, et pourtant…

Quant à Jillian, elle gagne sa vie en écrivant : autrement dit elle n’a rien de l’heroïne badass que l’on attendrait dans ce genre d’aventure. Au contraire, elle tient plus de l’héroïne du quotidien à laquelle on s’identifie facilement : ses hésitations la rendent d’autant plus proche du lecteur, lui aussi décontenancé par les évènements.  


☞ ‘tention c’est pas tout rose


Il est temps d’émettre quelques réserves, car vient un moment où le récit en fait un peu trop : des incohérences ressortent, les coups de théâtre sont un peu évidents, et décrédibilisent du même coup certaines situations.

J’aurais aussi aimé en apprendre davantage sur le « fonctionnement » des arbres, certains points restant plutôt obscurs, même si ne gênant pas le récit en soi. (#jechipote)


Les Geôliers ressemble ni plus ni moins à un formidable trip sous acide ! 😀 Original et plutôt réussi, la peur n’y est jamais bien loin et l’ambiance quasi hypnotique du roman a tôt fait de nous faire perdre pied avec la réalité. Une chose est sûre : les promenades en forêt n’auront plus la même saveur désormais !

En bref :
– un mélange des genres qui fait son petit effet
– des personnages moins simplistes qu’en apparence
 ✘ – une longue mise en place un peu décourageante

Power Club T1 : l’apprentissage

Power Club T1 : L’apprentissage; de Alain Gagnol
Publié aux Editions Syros, 2017 – 500
pages 

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Anna n’est pas née sur Krypton, pourtant elle s’apprête à devenir une super-héroïne. Jeune et riche, elle répond aux critères du Power Club© ! Les termes du contrat sont les suivants : on lui inocule des boosters, une technologie de pointe qui la rend en quelques jours surhumaine, elle entre dans la légende aux côtés des huit super-héros déjà célèbres. En échange, elle se doit d’incarner le rêve absolu, de vendre son image aux médias, aux plus grandes marques. Et, accessoirement, elle est libre de sauver le monde.

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Qui n’a jamais répondu à la question suivante : « Si vous pouviez avoir un pouvoir, lequel choisiriez-vous? », des étoiles pleins les yeux, en imaginant un monde où nous serions tous dotés de ce genre de particularités ? Force est de constater qu’Alain Gagnol reprend avec originalité le thème des super-héros dans cette nouvelle trilogie ! Réservés à l’élite de la société, les pouvoirs s’achètent une petite fortune en 2038, et chacun, s’il y met les moyens financiers, peut donc devenir une icône aux yeux du reste du monde, en adhérant au Power Club, le club très fermé des super-héros.

Anna, qui se retrouve dans le rôle de la nouvelle recrue, s’avère être une héroïne touchante par son humanité, et sa naïveté. On retrouve une certaine dualité dans son personnage. En effet, si elle est d’abord séduite par les capacités extraordinaires que lui octroient ses boosters (=les petites particules mi-informatiques, mi-biologiques, qui lui ont été injectées dans l’organisme), elle découvre peu à peu l’envers du décor, ce qui ne lui convient pas tout à fait… elle est portée, malgré elle, sur le devant de la scène, on lui propose de nombreux contrats publicitaires, et les soirées mondaines semblent être plus importantes que le fait de sauver des vies. Le Power Club a-t-il été fondé pour venir en aide à la population, ou bien pour générer des profits extraordinaires à l’agence ?…

Si l’on reste bien dans le roman d’apprentissage, notamment à travers les nouveaux pouvoirs d’Anna, et les nombreuses scènes de combats, Alain Gagnol n’a pas peur de détourner certains clichés du genre pour offrir au lecteur une réflexion intéressante, qui fait la grande force du récit. Ainsi, la critique de la société de consommation, ou de la sur-médiatisation générale, fait diverger Power Club des séries habituellement mises en scène par Marvel ou DC Comics. 

Vous l’aurez compris, on a affaire à une histoire de science-fiction passionnante ! A la fois prenant, humoristique, et moralisateur, le roman est plein de références, et constitue un bel hommage aux comics et autres œuvres de super-héros, tout en apportant une réflexion critique intéressante. Quant à Anna, loin des clichés habituels, elle fait une merveilleuse héroïne grâce à son côté raisonnable et réfléchi. Bref, nul doute que l’on attend impatiemment la suite de la trilogie ! 

En bref, ce roman c’est :
– une héroïne très crédible et humaine
– une critique acerbe des dérives de la célébrité
– une intrigue qui tient en haleine

La Faucheuse

La Faucheuse; de Neal Shusterman
Publié chez Robert Laffont (Collection R), 2017 – 504
 pages 

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Les commandements du Faucheur :

Tu tueras.
Tu tueras sans aucun parti pris, sans sectarisme et sans préméditation.
Tu accorderas une année d’immunité à la famille de ceux qui ont accepté ta venue.
Tu tueras la famille de ceux qui t’ont résisté.


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Pour mieux s’immerger dans le récit, mieux vaut ne pas trop en savoir sur l’histoire… Voici néanmoins un bref résumé de l’intrigue pour les plus curieux : dans le futur, les hommes ont trouvé le moyen de vaincre la mort et peuvent désormais vivre éternellement. Seulement, cela n’empêche pas la population mondiale d’augmenter… Pour réguler tout ça, un groupe a été constitué : on les appelle les faucheurs. Personnages importants et respectés, ils sont chargés de « glaner », au hasard des personnes de tout âge/milieu social/ethnie. On suivra Rowan et Citra, deux jeunes gens destinés, bien malgré eux, à devenir apprentis faucheurs. Ils devront alors apprendre l’art de tuer, et comprendre en quoi leur mission est nécessaire pour la communauté.

☞ Une intrigue atypique
Le gros atout de ce premier tome réside dans l’originalité de l’histoire. Loin des dystopies qu’on a vu fleurir à une époque, La Faucheuse s’apparenterait plutôt à une forme d’utopie…mais tient en même temps du roman de science-fiction un peu atypique.

Le monde créé par Neal Shusterman soulève beaucoup d’interrogations, puisqu’il met en place une société dans laquelle aucun gouvernement n’est plus au pouvoir, et où tous les hommes sont relativement égaux financièrement et matériellement. Au dessus de tout ce petit monde se trouve Thunderhead, une gigantesque base de données qui a réponse à tout et subvient aux besoins de chacun. De quoi s’interroger sur notre futur proche à l’heure où de nombreuses incertitudes planent… 

☞ Les faucheurs, de vaillants serviteurs ? 
Si l’univers est richement décrit, le fait que l’histoire soit racontée du point de vue des faucheurs, et non des victimes, apporte une touche d’originalité supplémentaire !

Vous imaginiez sans doute de macabres silhouettes vêtues de noir ? Eh bien vous seriez surpris, car ici, l’auteur a choisi d’affubler ses faucheurs d’étoffes chamarrées, qui reflètent davantage leur grade dans la société.

Hommes ou femmes choisis de manière aléatoire, ces représentants de la mort sont soumis à plusieurs règles immuables, et sont tenus d’agir avec moralité et compassion envers les glanés. Car prendre une vie est loin d’être insignifiant, et chaque faucheur doit avoir conscience de l’acte qu’il accomplit. Si certains s’acquittent de leur mission comme il se doit, le lecteur découvre vite l’existence d’une autre espèce de faucheur, qui se complaît dans l’acte de tuer…

 » Le noir représentait l’absence de lumière, or les faucheurs étaient tout le contraire. Lumineux et éclairés, ils étaient reconnus comme étant la fine fleur de l’humanité. « 

 » Prend garde à ne jamais perdre ton humanité, ou bien tu ne seras plus qu’une machine à tuer. « 

☞ Exit les clichés du YA !
On notera -pour une fois dans un roman YA- l’absence de romance, ce qui est bien vu, puisque cela desservirait plus le texte qu’autre chose ! C’est un soulagement de pouvoir lire, de temps en temps, une bonne histoire qui n’inclue pas de sentiments dégoulinants.

Quant aux personnages, ils sont relativement banal, du moins leurs caractéristiques physiques ne sont pas accentuées au possible : pas de beau jeune homme bodybuildé au regard ténébreux, ni de jeune fille parfaite : Citra et Rowan cumulent d’ailleurs les imperfections, doutent de tout, et font, au final, de chouettes héros !

Autre petit bonus : la fin est par-fai-te. D’habitude, dans ce genre de grosse série YA, on a droit au gros cliffhanger de fin qui frustre le lecteur et le pousse à vouloir se jeter sur la suite… Heureusement, ce n’est pas le cas ici : l’épilogie se suffit d’ailleurs à lui-même, même si on sent que le récit appelle une suite. Bref, de quoi patienter gentiment, sans se prendre trop la tête d’ici le prochain tome ! 

☞ Erreur dans la traduction ou mauvaise plume ?
Là où le bât blesse, c’est au niveau du style littéraire, et c’est d’ailleurs le seul bémol du livre ! Au vue des avis dithyrambiques qui sont apparus sur diverses chaînes booktubes ou blogs, on pouvait s’attendre à une certaine qualité d’écriture. Malheureusement, c’est loin d’être le cas… Alors, soucis de traduction ou style imparfait ? Dans le doute, foncez plutôt sur la VO !

Moitié thriller, moitié récit de science-fiction futuriste, La Faucheuse est un véritable page-turner ! Addictif et quasi-sans temps morts, le roman met en place un univers riche et surprenant que l’on prend plaisir à découvrir au fur et à mesure, pour peu que l’on fasse fi du style littéraire,  simpliste et maladroit, dans la version française.

En bref, ce roman c’est :
– un univers unique et atypique 
– de bonnes interrogations sur la forme de notre société

– une bonne dose de suspense
– un style d’écriture clairement améliorable

Phobos 3 : il est trop tard pour renoncer

Phobos T3; de Victor Dixen
Publié chez Robert Laffon (dans la collection R), 2016 – 624
 pages 

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Ils sont les douze naufragés de Mars. Ils sont aussi les complices d’un effroyable mensonge. Les spectateurs se passionnent pour leur plan de sauvetage, sans se douter du danger sans précédent qui menace la Terre.
ELLE EST PRÊTE A MOURIR POUR SAUVER LE MONDE
Au risque de sa vie, Léonor est déterminée à faire éclater la vérité. Mais en est-il encore temps ?
MÊME SI LE COMPTE À REBOURS EXPIRE, IL EST TROP TARD POUR RENONCER.


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J’ai préféré attendre un peu avant de rédiger ma chronique, sans quoi vous auriez sans doute eu droit à quelque chose comme : « %*!#$! ». Depuis, j’ai heureusement remis de l’ordre dans mes pensées !

Si comme pour moi, la fin du second tome flotte dans le brouillard de votre esprit, soyez rassurés amis lecteurs, les choses se remettent très vite en place. Et pour cause, l’auteur reprend son histoire exactement là où elle s’était arrêtée, ce qui permet de se remettre vite dans le bain.

   ☞ Une tension permanente
Le moins qu’on puisse dire, c’est que Victor Dixen ne nous laisse pas le temps de souffler ! Si les précédents tomes étaient déjà prenants, attendez-vous à être pris dans une bulle avec celui-là, comme complètement coupé du monde extérieur. Le rythme est toujours haletant, voire presque suffoquant par moments : évidemment les multiples rebondissements qui ponctuent le livre n’y sont pas pour rien !

   ☞ Une saga plus sombre qu’il n’y parait…
J’ai apprécié que le récit gagne en maturité au fil des tomes : si le premier opus était davantage tourné vers les sentiments naissants entre les différents candidats, le troisième se montre bien plus sombre et tend à mettre en avant les dessous du programme Genesis ainsi que les intentions peu louables d’une Serena McBee plus malfaisante que jamais. 
Évidemment, certains échanges entre les personnages restent un peu niais ou particulièrement clichés (si vous l’avez lu, je suis sûre que vous voyez de quoi je parle !), mais globalement, l’anti-romantique que je suis a été satisfaite.  🙂
L’auteur -en plus d’être un conteur de talent- imagine finalement le pire dans Phobos, en mettant en avant des situations politiques horrifiques. De quoi nous laisser pantois et nous inciter à réfléchir sur notre société actuelle…

Attention, malgré mon enthousiasme, j’ai quand même quelques éléments à reprocher à ce troisième tome.

   ☞ Des détails invraisemblables et trop peu de réponses
J’ai d’abord regretté que Victor Dixen se focalise tellement sur les événements se déroulant sur Terre, au détriment du quotidien des pionniers martiens. J’aurais aimé en savoir davantage sur la manière dont ils appréhendaient chaque nouvelle journée, même si c’est évoqué à mi-mots.
D’autre part, j’ai eu du mal à avaler certains éléments : notamment le fait que les pionniers fassent la girouette et calent leur opinion sur celle de Serena…tout ça m’a paru tellement peu crédible par rapport à leurs antécédents, que ma lecture en a été un peu gênée.
Enfin, je ne compte pas le nombre incalculable de fois où j’ai eu envie de trucider l’auteur ! Il joue complètement avec nos nerfs : les révélations s’enchaînent, mais c’est souvent pour mieux soulever de nouvelles questions !  D’ailleurs, de nombreux points restent encore sans réponse à la toute fin du livre, qui ne comporte pas d’épilogue. Victor Dixen se laisse donc une (grosse) porte ouverte et ne semble pas prêt à quitter le programme Genesis dans l’immédiat…  🙂

Pour moi, ce troisième tome conclut en apothéose une saga dont on sent que Victor Dixen n’est pas encore prêt à se détacher (et puis quoi, nous laisser sur cette fin?! Impossible…). Le roman se distingue par une construction riche en suspense et une plume acérée, ne laissant aucune place à d’éventuels temps morts. Bref, une réussite sur tous les plans en ce qui me concerne ! Et malgré les quelques points qui ont pu me gêner, j’imagine que je serai au rendez-vous pour une prochaine aventures avec nos pionniers de Mars ! 

En bref, ce roman c’est :
une plume de talent
– une intrigue explosive
– un ascenseur émotionnel
– une fin ouverte

Illuminae T1 : Dossier Alexander

Illuminae T1 : Dossier Alexander; de Jay Kristoff & Amie Kaufman
Publié chez Casterman
, 2016 – 616 pages

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En 2575, la planète de Kady Grant, 17 ans, et Ezra Mason, 18 ans, est attaquée par l’entreprise interstellaire Bei Tech. Lors de l’évacuation de population, Kady embarque sur l’Hypatie et Ezra sur l’Alexander, mais ils parviennent à garder contact en secret. Grâce à ses talents de hackeuse Kady découvre que l’état-major est impliqué dans cette affaire… Alors qu’ils sont toujours traqués par Bei-Tech, commence un véritable jeu d’échecs. Qui ment ? Qui dit la vérité? Qui manipule l’autre ? Mais d’autres dangers mortels les guettent, quelque part dans l’espace…

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Ce qui interpelle en premier quand on feuillette Illuminae en librairie, c’est le choix de la forme. Loin du roman classique, sans narration continue, le livre contient une multitude de documents qui nous permettent de suivre l’avancée des choses sur les différents vaisseaux. On retrouve donc en vrac : des conversations retranscrites dans des rapports officiels, des descriptions de vidéos de caméra de surveillance, des échanges d’e-mail ou de communications radios entre les vaisseaux… Il y a un réel soucis du détail et d’authenticité : la typographie change en fonction du type de document dont il s’agit et certains, plus officiels, comportent même un logo réglementaire. Au final, Illuminae se lit autant qu’il se regarde : on y trouve par moments des calligrammes, plusieurs schémas ou notices, et même des lignes de texte qui ondulent sur la page, suivant ainsi le tracé des missiles.
A la question fatidique « Est ce que ça rend la lecture déplaisante ou agaçante ? », je réponds clairement non. C’est déstabilisant au début, durant quelques pages. Puis on se prend au jeu et on ne peut se détacher du livre !

Parce que les images valent parfois mieux que les mots, voilà. 

J’ai d’abord été un brin contrariée par le fait qu’on n’apprenne rien sur la situation des humains entre notre époque et le 26ème siècle. J’aurais aimé savoir comme l’espèce humaine en est arrivé à vivre dans l’espace. Est ce par choix ou par contrainte? … Mais le récit débute sur les chapeaux de roues, décrit brièvement l’invasion de la colonie Kerenza par une importante organisation, et nous montre comment une partie des civils parvient à fuir la menace. Bref, on rentre immédiatement dans le vif du sujet et avec du recul, je pense que c’était nécessaire, et qu’après tout, peu importe le « avant ». 

Ça commence comme une dystopie classique, comme on en a lu des dizaines, avant de se complexifier. On découvre vite que les héros vont devoir faire face à une menace grandissante au sein des leurs, à une intelligence artificielle franchement instable, et à un virus apporté par l’ennemi…tout ça en ayant toujours le fameux ennemi aux trousses.
Malgré son format particulier, Illuminae offre une bonne dose d’action, pas mal de retournements de situations, et nous permet, étonnamment de nous attacher aux personnages comme on le ferait dans un roman « normal ».

Sa narration inhabituelle et variée le rend très rythmé, et fait de Illuminae un excellent roman de science-fiction jeunesse comme je n’en avais pas lu depuis longtemps ! On ne s’ennuie pas une seule seconde et les 600 pages s’avalent à toute vitesse. Palpitant, en plus d’être original, il pose des questions intéressantes vis à vis des avantages et risques que présentent les intelligences artificielles. J’attends déjà la suite avec impatience !

En bref :
– un livre très esthétique
– une expérience de lecture originale
– un véritable page turner !

Memorex

Memorex; de Cindy Van Wilder
Publié chez Gulfstream dans la collection Electrogène, 2016 – 406 pages


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Cela fait un an que la vie de Réha a basculé. Un an que sa mère est morte dans un attentat contre sa fondation, Breathe, qui promeut un art contemporain et engagé. Le jour de ce sinistre anniversaire, la famille est réunie sur l’île : c’est le moment de lever les mystères, les tabous, les rancoeurs que Réha ressasse depuis un an. Au cœur de l’énigme : Memorex, la multinationale pharmaceutique de son père, ainsi que ses expérimentations sur la mémoire. Des expérimentations qui attisent les convoitises de personnages puissants et sans scrupules, prêts à tout pour accomplir leurs rêves les plus fous.

4Memorex est mon premier roman de Cindy Van Wilder, déjà connue pour sa trilogie de fantasy Les Outrepasseurs. C’est typiquement le genre de livre qu’il est difficile de chroniquer sans trop spoiler l’intrigue, au risque de gâcher le plaisir des futurs lecteurs…

Le début m’a un peu perdue dans le temps : effectivement, la particularité du roman réside dans les chapitres alternés qui le composent. Tantôt c’est Réha qui nous relate les évènements présents, tantôt l’auteur nous propose de plonger dans le passé, notamment lors de l’attentat, grâce aux points de vue d’autres personnages. On en apprend un peu plus à chaque fois, ce qui amène doucement  vers la révélation de secrets et l’explication finale.

J’ai particulièrement aimé l’ambiance mise en place par Cindy Van Wilder ! Dès lors que les héros se retrouvent sur l’île familiale, on sent que le cocon apparent se fissure. La tension monte peu à peu, et l’apparente tranquillité laisse place à un huis-clos haletant !

L’auteur arrive brillamment à mêler le thriller à la science-fiction, grâce au mystérieux projet Memorex, qui est finalement la clé de l’énigme. En plus des secrets de famille bien dissimulés, du mystère entourant l’attentat à la fondation et des expérimentations scientifiques dont il est question, j’ai apprécié le clin d’oeil à l’histoire de Frankenstein, ici remise au goût du jour.

Ma seule (petite) déception concerne Réha, l’héroïne. Loin d’être nunuche, elle est très charismatique et sait rester forte dans les pires situations, mais -peut être à cause de ça- je n’ai pas réussi à m’attacher réellement à son personnage.

Si, au final, Memorex n’est pas un coup de coeur, j’ai vraiment apprécié cette lecture haletante ! Loin du thriller classique, l’auteur mélange les genres avec brio et nous offre une belle réflexion sur l’humanité et l’éthique scientifique.

En bref :   
 – pas de répit pour le lecteur !
– une fin qui laisse songeur

   – héroïne “badass” pas totalement convaincante